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Photo du rédacteurYasser Louati

De la foi et du conformisme



Enfant je me demandais pourquoi les gens avaient peur des dirigeants arabes, pourquoi ces dirigeants faisaient la prière devant les cameras, allaient à la mosquée en fanfare ou encore pourquoi des imams chantaient leurs louanges et priaient autant pour eux à la télé. Des membres de ma famille avaient été emprisonnés, torturés et on continuait de prier pour le raïs.


Adolescent, je me demandais pourquoi ils étaient durs avec le peuple mais silencieux face à la corruption du régime et la violence de sa police. Et au fil des ans, les contradictions entre les enseignements de l’Islam et les gens désignés pour en parler devenaient de plus en plus flagrantes, de plus en plus caricaturales, de plus en plus indéfendables.

La goutte d’eau qui fit déborder le vase fut la série de révolutions dans le monde arabe, ce qu’on a appelé le “printemps arabe”. Des figures tutélaires de l’Islam aussi bien dans les pays musulmans qu’ici en Europe ou en Amérique du Nord se mirent à maudire et à promettre l’enfer aux millions de victimes du despotisme sorties demander justice. Puis une fois le despote tombé, saluèrent le courage du peuple. L’âge adulte est parfois triste à vivre quand on ouvre les yeux et qu’on choisit de se dresser contre les mêmes personnes qu’on a admiré étant plus jeune.




On serait tenté de ne pas se sentir concerné par ce qui se passe à la tête de bien des pays à majorité musulmane, mais les mécanismes utilisés par les despotes de ces pays, du Maroc au Pakistan, en passant par l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis ou la Syrie, ne sont en rien différents des mécanismes utilisés par bien des Imams, responsables associatifs ou prédicateurs qui usent et abusent de leur étiquette de musulman pour satisfaire leur quête de pouvoir. L’idée de liberté est perçu comme suspicieuse, celle de demander des comptes comme corruption, l’incrédulité face à la bêtise comme division et celle de “sortir contre le dirigeant” comme demande d’excommunication.


Qui se dit musulman ne peut être que pour la justice, peu importe contre qui il faudra se dresser. L’interdiction de l’injustice est absolue et totale et si un despote évoque un Dieu pour soumettre ses semblables, c’est que son Dieu est injuste et donc n’existe pas. Se dire musulman, c’est être révolutionnaire et la révolution elle, commence à la maison.

“C’est ce qui encouragea certains tyrans dans les nations décadentes à s’attribuer des qualités divines, en fonction de la disposition d’esprit de leurs sujets. On a pu même constater que chaque despote se pare d’un titre sacré qu’il partage avec Dieu ou qui lui donne un statut divin. Il s’entoure souvent de personnalités religieuses qui l’aident à opprimer le peuple au nom de Dieu, en divisant notamment les gens en communautés et en sectes qui s’opposent entre elles au détriment de la nation, permettant au tyran de prospérer.” Abd Al Rahman al Kawakibi, Du Despotisme





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